jeudi 5 janvier 2012

Bref, je suis allé à l’ambassade

Votre mission, si vous l’acceptez, sera de vous présenter, muni des justificatifs stipulés en première page de notre note informative consultable en ligne, à l’ambassade de France en Allemagne, sise au numéro 5 de la fort adéquatement nommée Pariser Platz, jouxtant la Porte de Brandebourg à Berlin, avant la date butoir du vendredi 30 décembre 2011 à midi, afin de vous inscrire sur les listes électorales consulaires, et dans la foulée, au registre des Français établis hors de France, et être en mesure d’exercer votre droit de vote lors des scrutins nationaux de 2012.


Et comment que je veux m’inscrire ! Je signe des deux mains. La dernière fois que j’ai grossi le lot de ces fumistes d’abstentionnistes, et je m’en souviens très bien, c’était un certain 21 avril 2002 : vous avez vu le résultat. Oui, j’avoue, tout est de ma faute. Maintenant vous savez enfin ce qui s’est passé ce jour-là, vous connaissez le responsable de cette affreuse débâcle. J’avais beau avoir un alibi en béton armé (de très belles truites grouillant vigoureusement dans les eaux claires et vives du haut Allier et ne demandant qu’à mordre à l’hameçon) et aucune possibilité de voter par procuration à Paris en cette funeste journée de printemps, le remords me tourmente depuis cet inexcusable manquement à mes devoirs de citoyen même si la pêche fut bonne et la truite, délicieuse, a quelque peu apaisé ma conscience. J’aurais vraiment dû y réfléchir à deux fois avant d’accepter cette mystérieuse invitation à taquiner le poisson avec un groupe de sympathiques chrétiens fondamentalistes et de fanatiques des apéros saucisson-pinard ; si j’étais parano je dirais que c’était un coup monté des réseaux lepénistes. Alors cette fois-ci, il fallait mettre toutes les chances de mon côté, à commencer par ne pas compter sur une hypothétique ouverture de l’ambassade le samedi 31, car on n’est jamais trop prudent...

Jeudi 29 décembre – 22 heures. Revenu de Martinique quelques heures plus tôt, je suis complètement dans le cirage après une bonne dix-huitaine d’heures de voyage. Avant de m’écrouler au lit, je fixe mes paupières à mes sourcils avec du scotch afin de garder les yeux ouverts encore quelques minutes, et parcours une dernière fois la liste des documents demandés par l’Ambassade.
Pour être inscrit au Registre des Français établis hors de France, vous devez fournir les documents suivants :
Si l’inscription se fait par courrier :
J La copie intégrale de mon acte de naissance ;
J La photocopie de ma carte d’identité et de mon passeport, et le cas échéant, du certificat de nationalité française ;
J La copie du livret de famille pour les personnes mariées ou les parents célibataires (le cas échéant) ;
J Un justificatif de domicile (villes-états de Berlin, Hambourg et Brême, états fédérés de Basse-Saxe, Brandebourg, Mecklembourg-Poméranie antérieure, Saxe, Saxe-Anhalt, Schleswig-Holstein et Thuringe) en présentant une photocopie de votre « Anmeldung » ou d’une facture récente de téléphone, gaz, électricité, contrat de location, relevés bancaires etc… ;
J une photo d’identité (35 x45 mm) ressemblante ; 
J une enveloppe timbrée à votre nom et adresse pour l’envoi de la carte consulaire ;
Si l’inscription se fait en personne à la section consulaire de l’ambassade ou lors d’une tournée consulaire :
J Tous les originaux des pièces mentionnées ci-dessus doivent être présentés.
MERCI DE REMPLIR UNE DEMANDE DISTINCTE POUR CHAQUE ADULTE
À Heures d’ouverture au public : lundi au vendredi de 9h00 à 12h00 et mercredi de
14h00 à 16h30, inch’Allah.
Je fais le point sur les documents en ma possession :
–> la copie intégrale de l’acte de naissance : je m’en suis occupé en personne à la mairie de Fort-de-France pendant mes vacances. Quel as de l’organisation ! Check.
–> ma carte d’identité. Yalla ! Check.
–> mon certificat de virginité de nationalité française : ouf, pas nécessaire. Check.
–> le livret de famille : pas nécessaire non plus (à bonne entendeuse...). Check.
–> ma dernière Anmeldung : Check.
–> une photo d’identité : OK je ferai ça tranquillement demain matin au photomaton de la gare de Frankfurter Allee avant d’aller à l’Ambassade. En plus je suis tout bronzé donc alles gut, ma photo va cartonner. Check.
–> une enveloppe timbrée : je dois bien avoir ça quelque part à la cave ou dans ma Bordellkammer mais je n’ai pas la force de m’attaquer à des fouilles archéologiques là tout de suite. Le plus simple c’est encore d’aller acheter rapidos une enveloppe et un timbre au bureau de poste de la Frankfurter Allee demain matin. Check.

Bref, tout baigne. Dans un état de demi-somnambulisme, je règle mon réveil pour 8h50, et tout est fin prêt. Je me laisse enfin sombrer dans un doux sommeil réparateur, pendant lequel je rêve que mon loyer a subitement augmenté de 200€ par mois et que ma Hausverwaltung ne veut rien entendre à mes protestations indignées. L’angoisse de la Gentrifizierung contamine jusqu’aux tréfonds de mon subconscient : je suis bel et bien rentré à Berlin de plain-pied. Hourra.

Vendredi 30 décembre – 8 heures 50. Un court solo instrumental résonne, puis la chanteuse Ayo fredonne suavement dans ma chambre encore sombre, avec force trémolos dans la voix : Down on my knees, I’m begging you. Eh oui, chaque matin, je me fais supplier de sortir du lit, je suis comme ça. Allez Ayo, accorde-moi encore un peu de rab de sommeil : je n’ai pas fini de me disputer avec ma Hausverwaltung, et j’étais sur le point d’avoir gain de cause. Tu me supplieras à nouveau de me réveiller dans dix minutes si tu veux bien. Je clique nonchalamment sur Snooze.

Vendredi 30 décembre – heure inconnue. Un bruit indistinct au-dehors me tire de mon sommeil béat. J’ai une vague impression de m’être rendormi depuis bien plus de 10 minutes, mais l’alarme n’a pas sonné à nouveau alors tout va bien, n’est-ce pas ? Par acquit de conscience, je jette machinalement un coup d’œil sur mon por... LA VACHE !!! Non mais c’est quoi cette histoire ? Suis-je affligé de troubles visuels ? Il ne peut pas être...

Houston, we've got a problem!

... 10 h 39 le vendredi 30 décembre 2011, soit exactement 81 minutes avant la fermeture de l’ambassade, quand même ??? Vite, j’attrape ma montre. Sans aucun doute, elle ne me fera pas de mauvaises blagues comme ce petit plaisantin de téléphone ? Mon portable est tout neuf, il est encore jeune, c’est normal qu’il me joue des tours. Ma montre, elle, a passé l’âge de ces blagues de potache, hein ? Hein ? Eh ben c’est perdu.

A big problem!

Mais non maisnonmaisnonmaisnon ! Ne me dites pas qu’il est onze heures moins vingt ! Comme un seul homme, je bondis du lit et me précipite à la cuisine pour consulter mon horloge rétro eighties préférée achetée pour 12€ aux puces de Boxhagener Platz. Le verdict est sans appel :

The mother of all problems!

C’est tout bonnement impossible. Je refuse de me rendre à l’évidence. Mon appart’ a dû être englouti dans une faille spatio-temporelle qui a déréglé toutes mes horloges, c’est l’explication la plus plausible à ce phénomène. Plutôt que de céder à l’affolement, je tente une ultime vérification en appelant l’horloge parlante. Une voix de cyborg femelle anéantit mes folles espérances et m’annonce sur un ton neutre et détaché de toutes choses d’ici-bas : «Hallo und herzlich willkommen bei der Zeitansage von der Telekom Deutschland. Au signal, il sera exactement 10 heures, 43 minutes et 30 secondes, et non ce nest pas un complot mondial contre ta petite personne, alors magne-toi le derche, gros boulet. BIIIP».

Vachement customisé le service d’horloge parlante chez les Teutons, dites donc. Épaté par cette énième preuve de l’inégalable professionnalisme germanique, mais surtout, au bord de la panique, je me jette en vitesse sous la douche et en ressors aussi vite, me rafraîchis le visage et la coiffure (pour la photo d’identité vous savez, ah la coquetterie...), branche mon fer à repasser, commence à repasser une chemise – euh, tout compte fait, défroisser simplement le col et les épaules devrait suffire, le reste ne se verra pas sur la photo –, avale un pot de yaourt comme petit déjeuner (partir le ventre vide pourrait être dangereux, je ne sais pas combien de temps je serai retenu), quitte mon appartement en trombe, dévale quatre étages, atteins ma cour intérieure, détache les trois antivols de mon vélo, les doigts fébriles et engourdis de froid, enfourche mon Holland-Rad et... meeeeeeeeeeeerde, mes documents ! Je descends de ma fière monture, rattache un antivol, remonte les cent-deux marches en vitesse, rouvre ma porte, attrape ma pochette de justificatifs, ressors, redescends l’escalier deux à deux (la dernière fois que j’ai essayé quatre à quatre, ça s’est fini avec 10 jours d’incapacité de travail), déverrouille mon cadenas de vélo, et c’est partiii ! Il me reste un peu plus d’une heure pour faire un grand tour dans la ville. Tiens, voilà qu’il pleuviote.

U-Bhf Frankfurter Allee
11 h 09  – Essoufflé, le visage perlé de sueur et rincé par la pluie, les cheveux mouillés et ébouriffés, j’atteins enfin le photomaton de la station de métro Frankfurter Allee. Elle va être magnifique cette photo. À l’invitation de l’automate, je me déleste de la fabuleuse somme de six euros. Et encore, je me réjouis de pouvoir faire l’appoint : la machine ne rend pas la monnaie, en plus de racketter le chaland de la sorte. Après avoir suivi les instructions, relu de force les consignes officielles (ne pas se mettre de burqa devant les yeux, pas de lunettes de soleil, pas de mèche sur le front, ne pas exhiber ses dents en or à la Joey Starr : toute fantaisie est prohibée, quelle tristesse) et patienté une éternité à chaque étape, enfin, je récupère quatre photos d’identité en couleur d’un type à la peau sombre qui ressemble à Mike Tyson en plus jeune avec une toison de caniche mouillé sur la tête. Force est d’admettre que ce sex-symbol, c’est moi-même. Pas le temps de faire de réclamation. Je ramasse mon précieux portrait-robot, ressors de la station, saute sur mon bolide et pars en trombe en direction du bureau de poste. Tiens, il neigeouille. Je me procure en vitesse dix enveloppes et deux timbres à 1,45€, au cas où... Puis je repars, pédalant à fond les mollets, en direction de la gare d’Ostbahnhof : plus question de parcourir à vélo tout le chemin jusqu’à l’ambassade. Ben ça alors, voilà qu’il pleuviouille et neigeotte en même temps.

11 h 34 – Je m’engouffre avec mon vélo dans un S-Bahn de la ligne S75 en direction de Spandau, et commence à reprendre espoir. À travers la fenêtre égratignée au cutter par quelque ado désœuvré, je contemple la grisaille berlinoise pour la première fois depuis trois semaines, et laisse vagabonder mes pensées devant ce rude paysage. C’est pas mal la Martinique en fin de compte, conclus-je, philosophe. Tiens, il pleut des grenouilles. Y’a plus de saisons.

11 h 45 – Je descends à la gare de Friedrichstraße. Je suis tout près du but ! Plus qu’une petit huitaine de minutes à vélo. Comme souvent, cette portion de la Friedrichstraße est très encombrée. L’appel du devoir de citoyen me rend intrépide, je zigzague, sans peur et sans reproche, entre les voitures qui avancent au pas sur la chaussée mouillée.

11 h 48 – Je vire à droite (au sens propre, pas politiquement parlant, qu’est-ce que vous alliez croire là...) sur Unter den Linden. Feu rouge ? Quel feu rouge ? Allez hop, ça passe ! Si on devait laisser les subtilités du code de la route faire obstacle à mon inscription sur les listes électorales, on ne s’en sortirait jamais, hein. Sur Unter den Linden, le trafic est plus fluide mais les véhicules sont un chouïa plus massifs. Des autocars de touristes me font des queues de poisson dans tous les sens. Je me faufile entre eux à la libanaise. Là encore, ça passe. Un jour peut-être, il faudrait que je songe à porter un casque...

Farpaitement, j'ai trouvé le temps de prendre une photo pendant cette folle équipée.

11 h 52 – Me voilà rendu à Pariser Platz, hamdullah ! Vite, il ne me reste plus qu’à attacher mon vélo à un réverbère, puis à pousser triomphalement la porte de l’ambass... Halt! Halt! Stopp! Nein, nein, nein! Es ist verboten! Plaît-il monsieur l’agent ? Je ne peux pas laisser mon vélo ici ? Non monsieur. OK, je vais un peu plus loin alors. Halt! Halt! Nein! Et ici non plus ? Nein, es geht nicht. OK, alors je l’attache de ce côté-ci de la barrière, si vous permettez. Ja, gut, junger Herr. Alles klar, Herr Kommissar. Merci beaucoup.

Mon Hollandrad, dont je vous parle si souvent, est caché sur cette photo. Saurez-vous le retrouver ?

11 h 54 – Les boules, cette histoire de vélo a failli m’empêcher d’arriver à temps à l’ambass... Haaaalttt! Halt! Nein! On ne passe pas ! Quoi encore, monsieur l’agent ? Vous n’alliez pas me dire que je ne peux pas accéder à l’ambassade par cette entrée ? Bien sûr que non. Vous voulez aller à l’ambassade de France ? Alors pour vous c’est l’entrée du public, sur la Wilhelmstraße. Quoi ? Wilhelmstraße ? Il faut faire le tour du pâté de maisons ? Ich glaube schon.Vraiment ? Oh que oui mon petit monsieur. Aaaaaargh ! C’est clair comme de l’eau de roche, monsieur le policier boche.

Eh bien je suis bon pour un petit sprint final alors. Et en plus je dois revenir sur mes pas pour regagner cette entrée des ploucs du public. Que de temps perdu à la fin. Je laisse ma bicyclette à sa place au lieu de m’attaquer à nouveau à tous les antivols, et fonce droit devant, comme si l’avenir de la France en dépendait. D’ailleurs, c’est un peu le cas, non ?



11 h 57 – VICTOIRE ! Je suis arrivé dans les temps à la section consulaire de l’ambassade de France ! Au passage, c’est ma toute première visite d’une ambassade de France, et c’est seulement la deuxième fois de ma vie que je passe la porte d’une ambassade. Eh bien ma foi, chez nous, c’est une autre paire de manches que dans la modeste ambassade de Syrie, près de Ku’damm. Ici, on passe sous un portique détecteur de métaux, on se fait confisquer téléphone portable et appareil photo, et on doit suivre un gardien pour parvenir jusqu’à la salle d’attente. Un bémol cependant : ils ne m’ont pas désinfecté, à l’eau de Javel... Sans doute un petit oubli.

Une certaine fébrilité règne dans la pièce où patientent les visiteurs. Manifestement, je suis loin d’être le seul à m’être présenté, comme une fleur, juste avant l’expiration du délai. Boulets franco-berlinois, unissez-vous ! Après une courte attente, vient mon tour d’être appelé. Je suis conduit au bureau d’une fonctionnaire affable et de bonne humeur. La démarche est assez vite réglée, et sans rebondissement particulier. À un moment donné, alors qu’elle examine mon acte de naissance, la préposée, conquise, y va de son petit commentaire flatteur :

«Ah, mais qu’est-ce qu’ils sont beaux ces actes de naissance délivrés à la Martinique !
– Euh, bah, euh, vous savez, là c’est l’en-tête de Fort-de-France, mais peut-être que ceux des autres communes sont différents...
– Non, vraiment, la semaine dernière j’en ai eu un autre, je ne sais plus de quelle ville en Martinique, et il était très beau aussi. Peut-être pas aussi élégant que le vôtre, mais joli quand même.
– D’accord, euh, merci.»

Ce 30 décembre 2011 restera à jamais le jour où une femme m’a complimenté pour la «beauté» de mon acte de naissance martiniquais. On reçoit les compliments que l’on mérite. C’est vrai que c’est un joli papier, où l’ancien hôtel de ville de Fort-de-France, une élégante bâtisse coloniale, apparaît en filigrane sur un grand fond bleu ciel, mais bon, de là à s’extasier à en perdre contenance, tout de même... Mon interlocutrice elle-même n’était pas vilaine non plus, mais ce n’était pas le moment de conter fleurette : j’avais une démarche administrative importante à mener à bien. Je me suis donc retenu de la féliciter pour la beauté de son agrafeuse, car qui sait où tout ce badinage frivole nous aurait mené.

Encore quelques minutes à tapoter sur son ordinateur, faire des copies, et me donner quelques explications, et voilà, elle me rend tous mes documents, même ma photo de boxeur à 6€ («tiens, elle me fait penser à quelqu’un de connu cette photo, mais qui ?»), même mon enveloppe timbrée («ah, ce n’était pas indiqué sur le site du consulat mais comme vous vous déplacez en personne, on n’a pas besoin de l’enveloppe puisqu’on vous remet votre carte consulaire directement en main propre»), et me confirme que je suis officiellement inscrit au fichier des Français de l’étranger et sur les listes électorales ! Prends ça, Sarko ! Dans tes dents, Guéant ! Et toi aussi prends ça, «vague bleu Marine» de mes deux !

Bref, je suis allé à l’ambassade.

Épilogue 1 :

Je quitte l’ambassade, soulagé, rendu euphorique par le sentiment du devoir accompli. Après cette matinée de stress, je me suis baladé sur l’avenue, le cœur ouvert à l’inconnu, j’avais envie de dire bonjour à n’importe qui, et de fêter dignement la fin d’année.

Épilogue 2 :

Je dois une fière chandelle aux policiers qui m’ont gentiment rabroué devant l’ambassade. Sans eux, j’aurais sûrement retrouvé mon Hollandrad à la fourrière et payé une amende salée en prime... mais il est tellement riquiqui ce panneau qui énonce l’interdiction de placer des «objets de tout type» sur ce périmètre, qu’en toute bonne foi, et dans ma précipitation, je ne l’avais pas vu.

Oups la boulette...

Épilogue 3 : 

Contrairement à ce que stipule la législation française, les Allemandes peuvent porter un voile islamique sur leur photo d’identité, pourvu qu’il ne couvre ni n’assombrisse le visage. Comme quoi...

Réussir sa Passfoto en 16 leçons

Épilogue 4 : 

Voici un résumé de 150 ans d’histoire franco-allemande vus depuis un «banal» immeuble. Le bâtiment actuel de l’ambassade de France en Allemagne, conçu par Christian de Portzamparc et inauguré par Jacques Chirac en janvier 2003, se situe sur un terrain acquis en 1860 par Napoléon III en personne. La villa qui s’y trouvait fut alors agrandie et somptueusement aménagée et redécorée, car nous autres les Français avons trop la classe. Elle devint l’ambassade de France en 1883, connue, à l’époque du Kaiser, sous le nom d’«Hôtel de France». Les ambassadeurs français successifs y tinrent des réceptions mémorables pour impressionner les Prussiens, et poursuivirent cette mission sacrée à l’époque de la république de Weimar, une fois atténués les  forts sentiments de francophobie consécutifs à la défaite allemande de 1918 et au diktat de Versailles. Sous les Nazis, l’ambassadeur de l’époque, André-François Poncet, entretint de cordiales relations avec la crème de la crème national-socialiste, tout en informant sans relâche son gouvernement de la menace que représentait l’Allemagne nazie et en tirant inlassablement la sonnette d’alarme sur les nuages belliqueux s’amoncelaient sur l’horizon pacifique des années 1930. Les fonctionnaires français évacuèrent l’immeuble en septembre 1939, après la déclaration de guerre, et les Allemands, pragmatiques, en firent une annexe du Reichsministerium de l’Armement. Les bombardements de 1945 rayèrent l’Hôtel de France de la face du monde, et la RDA finit par déblayer les ruines à la fin des années 1950, tandis que l’ambassade de France en RFA déménageait à Bonn, la nouvelle capitale. Le terrain de l’Hôtel de France, situé à proximité immédiate du Mur de Berlin, qui serpentait à quelques mètres de là, resta vide jusqu’à la fin de la Guerre Froide, puis fut restitué à la France qui put y reconstruire et réinstaller son ambassade sur son site historique.

L'Hôtel de France sur Pariser Platz dans son apparence d'avant 1939.
Et toujours aucun emplacement digne de ce nom pour stationner convenablement son vélo...

14 commentaires:

  1. Excellent, une véritable course contre la montre, bravo! JE me suis encore tellement poilée qu'un collègue m'A regardé bizarement, faut dire que je n'ai qu'à lire À la maison et pas au boulot :-)

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  2. Un post un peu plus long que Guerre et Paix, mais tout aussi palpitant. Si tu le fais éditer en 18 volumes, je suis preneur.

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  3. ;-)

    course contre la montre. check!

    Wilhelmstrasse on n'a pas le droit
    de se garer (enfin son vélo) devant la porte... faut aller un peu plus loin. ou sur le trottoir d'en face!

    Cess

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  4. Quelle aventure ! Tiens la poste de Frankfurter Allee elle est à quel niveau, je l'ai jamais vue ?

    Après une mésaventure en Italie quand je vivais en Tchéquie où j'ai jamais eu le temps et les moyens de monter m'inscrire à Prague alors que cela aurait facilité les choses pour refaire mes papiers volés, une des premières choses que j'ai fait en arrivant à Berlin c'est m'inscrire au registre et sur la lise ^^

    On se croisera peut-être quand on ira voter qui sait ^^

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  5. @ Little Cat - bah ouais quand on lit des blogs au bureau il faut savoir donner le change :-) Désolé de nuire à ta productivité et à ta crédibilité au boulot en tout cas !

    @ Alain - à qui le dis-tu ! C'était diablement long à écrire aussi, et j'ai bien pensé à le tronçonner en plusieurs bouts mais j'avais peur que ça ne casse le rythme... ;-)

    @ Cess - hé ouais sacrée course contre la montre. Oui en effet je suppose qu'on ne peut pas mettre son vélo pile devant le bâtiment consulaire de la Wilhelmstraße, mais en tout cas la "zone d'exclusion" est bien plus restreinte que devant la "vraie" ambassade !

    @ Cécile. Ouaip ! Il y a un bureau de poste dans un centre commercial tout moche et assez petit (pas le Ring Center hein), qui donne sur le côté nord de l'avenue. C'est dans les n° 71-75 un truc comme ça. Je l'ai découvert car à chaque fois que j'ai du courrier en recommandé, c'est là que je dois le récupérer. Oui on se verra ptêt le jour de l'élection alors :-)

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  6. T'as oublié :

    Epilogue 5 : Sony Ericsson, c'est de la m... ;)

    Des Français comme toi font honneur à notre patrie.
    Bon courage en cette nouvelle année.

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  7. prendre une douche et te rafraichir le visage, manger un yaourt alors que tu as moins d'1h 1/2 pour tout faire... pas de doute, c'est bien toi!

    Mais rassure-moi, tu n'as pas appelé pour de vrai l'horloge parlante ? Et les photos de ton portable, de ta montre et de ton horloge, tu les as prises tranquilou le lendemain à 10h39 ?

    Désolée, ça faisait un moment que je n'étais pas venue, mais bravo pour cet article!

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  8. Je me suis fait la même réflexion que Jessica. Tu n'as pas réellement appelé l'horloge parlante et pris des photos de ton portable, de ta montre et de ton horloge dans un moment pareil, oder? Ou s'agit-il d'un accès de bloguite aiguë...?
    Ton texte est très drôle en tout cas.

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  9. Ja! Du hast es geschaft! :))
    Ah ça me rappelle des souvenirs: manif contre la guerre en Irak en février 2003 puis plus tard lorsque je dus m'y rendre suite au vol de mon passeport. L'accueil y fut bien moins sympathique (sauf celui du gardien, un Réunionnais fort chaleureux)donc ils ont fait des progrès, mais c'est vrai que je n'ai pas l'arme de dissuasion foyallaise à ma disposition non plus. Toutefois leur service fut très efficace.
    Merci pour la leçon d'histoire du bâtiment, c'est chouette d'en savoir un peu plus sur notre ambassade en Allemagne.

    Bises

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  10. @ Kapadnon - peut-être, mais on va dire que c'est moi qui ai encore besoin de m'habituer à mon nouveau tél, plutôt que de l'incriminer tout de suite :-) Merci pour ton commentaire en tout cas, et, oui, la patrie est en danger !

    @ Jessica - Comme tu m'as grillé !!! LOL. Merci pour ta petite visite, ca fait toujours plaisir !

    @ Fab - Bah oui j'avoue, évidemment, que certaines photos n'ont pas été prises dans le feu de l'action, en fait la seule que j'ai vraiment prise avant d'arriver à l'ambassade c'est celle des gros autocars sur Unter den Linden. Le reste, j'ai dû gérer après...

    @ Elsa - ah tiens j'avais pas compris que tu avais vécu à Berlin... oui sûrement le contexte politique devait rendre les choses plus tendues. J'ai été étonné de leur efficacité moi aussi, en fait c'est vite réglé ces trucs. Le plus compliqué, c'est encore d'arriver à temps à l'ambassade !

    Bon weekend tout le monde !

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  11. J'aime beaucoup le style Jack Bauer 24 etc qui m'a tenue en haleine, va-t'il pouvoir ou non faire barrage à Marine???? ;-)
    Et pour le vélo tu as bien fait: quand je suis allée m'inscrire au consulat (et sur les listes électorales par la même occasion au début de l'année dernière je me suis pris un PV de stationnement qui m'a quand même couté 60 euros...et 3 points de permis que je n'ai heureusement pas perdus...). ici non plus ça rigole pas ;-)

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  12. @ E - la suite des aventures de Jack Bauer vs Marine, ce sera au premier tour de la présidentielle ! Elle a qu'à bien s'tenir !

    :-)

    Fichtre, pas de chance pour ta visite au consulat, ça ne rigole pas du tout dis donc... de toute évidence tu n'as pas eu la même chance que moi et n'a pas été enquiquinée par des policiers qui, pour tout embêtants qu'ils étaient, m'ont finalement sauvé la mise et évité de retrouver mon vélo à la fourrière, de payer une amende et de devoir me racheter 3 antivols...

    Mais tout de même, c'est fou ton histoire : dans les pays arabes que j'ai visités, c'est tellement la foire d'empoigne sur les routes qu'on a du mal à imaginer de perdre 3 points pour stationnement gênant... pas de chance !

    Comment ça se passe le vélo à Doha ???

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  13. Puisque tu n'as pas eu besoin de la photo, on peut la voir ?

    En tout cas, je vois que les services consulaires français sont efficaces partout. C'est compliqué de mettre à jour un site Internet ? J'avais raconté mes mésaventures au consulat de Los Angeles (oui, pour le Colorado, il faut aller en Californie) : http://monesie.canalblog.com/archives/2011/04/10/20863515.html

    Moins haletant le suspense, je dois dire.

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  14. Tu veux dire, la photo en mode Mike Tyson à chevelure de caniche ??? Euh, oui, une autre fois peut-être :-)

    Sympa ton histoire de consulat. Bah disons que pour moi, par rapport à toi, la principale difficulté a été d'arriver à temps sur place (alors que l'ambassde n'est qu'à 30 minutes à vélo de chez moi...), une fois dans les locaux tout s'est plutôt bien passé... Je suppose que de Denver les Bains à LA il y a tout de même un sacré voyage à entreprendre, au moins deux heures d'avion, non ? Alors effectivement c'est pénible de tomber sur des fonctionnaires peu informés et pas très serviables en plus... L'inscription sur les listes consulaires était une démarche très simple. On verra comment ca se passera pour une démarche plus compliquée comme le renouvellement de passeport, d'ici 2 ans...

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Un petit bonjour ?

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