Cette semaine de la Pentecôte, dans le grand pays qui jouxte la Teutonie (non, pas notre glorieuse et triomphante Patrie où la Lumière vainquit les ténèbres, mais l’autre grand voisin, côté est), une information absolument sensationnelle a été placardée en «une» des journaux, semant, on s’en doute, le trouble, l’incompréhension, la consternation chez leurs lecteurs abasourdis.
Je n’aurais probablement rien su de ce big-bang médiatique qui a ébranlé les rives de la Vistule si je n’était pas tombé par hasard sur le dernier numéro de Newsweek Polska, dans un banal Kiosk de Prenzlauer Berg. (Hebdomadaire étatsunien -> Publié en Pologne -> Vendu en Allemagne. Vive la mondialisation!) Bien entendu, tout comme vous, chers amis lecteurs, je n’y entends goutte à la langue polonaise qui, soit dit en passant, est une autre paire de manches en matière de complexité et d’imprononçabilité que l’allemand qui, en comparaison, passe pour de la gnognotte ultra-fastoche avec ses quatre pauvres déclinaisons et sa prononciation éminemment musicale et ô combien plaisante à l’oreille. Comme quoi, il y a toujours pire. Bref. Où en étions.nous? Ah oui, Newsweek Polska. Heureusement, l’illustration en première page était suffisamment parlante pour que même les plus obtus d’entre les profanes comprennent aisément de quoi il en retourne sans recourir aux approximations de Google Traduction:
Et voilà comment le secret le mieux gardé de ces 2000 dernières années a été enfin révélé à la nation polonaise: non seulement Jésus et Marie portaient des t-shirts imprimés avec des étoiles de David dessus, mais par-dessus le marché, ils étaient, tenez-vous bien, juifs! JUIFS!! Jezus Maria ŻYDZI! Ah bah Żut alors! Et on ne l’apprend que maintenant?
Il est vrai que cette paire de félons, de Judas, a bien caché son jeu tout ce temps: «Jezus», après tout, s’est fait charpentier (et Messie à ses heures perdues) alors qu’il aurait pu, pour faire «plus juif», entreprendre des études de gestion à Dauphine et devenir avocat, banquier, réalisateur de cinéma, ou peut-être tailleur pour femmes... Yalla! Quant à Marie, à aucun moment les Évangiles ne citent ses «Monge mon fils, monge!» suppliants, ni ses incessantes récriminations contre les mauvais choix de carrière du Fruit de ses entrailles, ce grand dadais qui a préféré s’adonner au prêche dans les rues, et de surcroît gratuitement, au lieu d’ouvrir un cabinet de psychanalyse ou une boutique d’import-export. («Et avec ton charisme, mon fiiilsss, tu pourrais t’associer avec ton riiiiche cousin Nathan Sarfati et monter une affaire florissante au lieu de musarder à longueur de journée avec ces traîne-savates enguenillés. Cinq mille pains et poissons distribués à la foule? Gratuitement?! Oï, oï, oï! Mais qui m’a donné un fils pareil?» – «Certainement pas moi!», grommelerait alors Joseph, l’œil noir, caressant sa barbe dans un recoin sombre du salon.)
Oui, le Nouveau Testament ayant été soigneusement expurgé des tranches de vie les plus, hum, truculentes, on comprend mieux que l’humanité (et en particulier, la très catholique Pologne) ait été dupée pendant si longtemps. Au passage, on peut regretter que les saintes Écritures aient été si lourdement censurées, car quelques instantanés hauts en couleur de la vie quotidienne à Nazareth en auraient rendu la lecture autrement plus divertissante, je trouve. Il doit bien être possible de mettre la main sur le Director’s cut quelque part... Mais je m’égare. Revenons à notre scoop du millénaire.
Sérieusement, il semblerait que cette couverture sensationnelle illustre un dossier spécial consacré à l’«antysemityzmu» en «Polska». Hélas, je serai bien incapable vous en dire plus, à cause de mes grosses lacunes dans la langue de Karol Wojtyla. Après avoir passé le gros titre à la moulinette de Google Traduction, voilà le résultat: «Jésus LES JUIFS Maria! Comme la Pologne contemporaine face à la honte de l’antisémitisme?» Cet aimable charabia dépourvu de verbe ne donne pas follement envie de lire plus avant le reste de ce dossier éminemment prometteur. J’espère que vous ne m’en tiendrez pas rigueur.
Il ne me reste plus qu’à faire des conjectures, en guise de conclusion. Dans quelques siècles, dès lors que le bon peuple sera mûr pour supporter la cruelle et insoutenable vérité, Newsweek Polska titrera, selon toute vraisemblance:
«Michael LES NOIRS Jackson! Comme la Pologne contemporaine face à la honte du rasizmu?»
«Lady LES HOMOSEXUELS Gaga! Comme la Pologne contemporaine face à la honte du l’homofobią?»
«Zinedine LES MUSULMANS Zidane! Comme la Pologne contemporaine face à la honte de l’islamofobią?»
L’avenir nous le dira. Ce ne serait pas mal du tout qu’ils le fassent: une si belle couv’ donnerait envie de s’abonner illico à Newsweek Polska.
Sur ces considérations pleines de légèreté, je vous dis à très bientôt !
Je n’aurais probablement rien su de ce big-bang médiatique qui a ébranlé les rives de la Vistule si je n’était pas tombé par hasard sur le dernier numéro de Newsweek Polska, dans un banal Kiosk de Prenzlauer Berg. (Hebdomadaire étatsunien -> Publié en Pologne -> Vendu en Allemagne. Vive la mondialisation!) Bien entendu, tout comme vous, chers amis lecteurs, je n’y entends goutte à la langue polonaise qui, soit dit en passant, est une autre paire de manches en matière de complexité et d’imprononçabilité que l’allemand qui, en comparaison, passe pour de la gnognotte ultra-fastoche avec ses quatre pauvres déclinaisons et sa prononciation éminemment musicale et ô combien plaisante à l’oreille. Comme quoi, il y a toujours pire. Bref. Où en étions.nous? Ah oui, Newsweek Polska. Heureusement, l’illustration en première page était suffisamment parlante pour que même les plus obtus d’entre les profanes comprennent aisément de quoi il en retourne sans recourir aux approximations de Google Traduction:
Jezus Maria ŻYDZI! Ca pour un scoop c'est un Méga-Żcoop! |
Et voilà comment le secret le mieux gardé de ces 2000 dernières années a été enfin révélé à la nation polonaise: non seulement Jésus et Marie portaient des t-shirts imprimés avec des étoiles de David dessus, mais par-dessus le marché, ils étaient, tenez-vous bien, juifs! JUIFS!! Jezus Maria ŻYDZI! Ah bah Żut alors! Et on ne l’apprend que maintenant?
Il est vrai que cette paire de félons, de Judas, a bien caché son jeu tout ce temps: «Jezus», après tout, s’est fait charpentier (et Messie à ses heures perdues) alors qu’il aurait pu, pour faire «plus juif», entreprendre des études de gestion à Dauphine et devenir avocat, banquier, réalisateur de cinéma, ou peut-être tailleur pour femmes... Yalla! Quant à Marie, à aucun moment les Évangiles ne citent ses «Monge mon fils, monge!» suppliants, ni ses incessantes récriminations contre les mauvais choix de carrière du Fruit de ses entrailles, ce grand dadais qui a préféré s’adonner au prêche dans les rues, et de surcroît gratuitement, au lieu d’ouvrir un cabinet de psychanalyse ou une boutique d’import-export. («Et avec ton charisme, mon fiiilsss, tu pourrais t’associer avec ton riiiiche cousin Nathan Sarfati et monter une affaire florissante au lieu de musarder à longueur de journée avec ces traîne-savates enguenillés. Cinq mille pains et poissons distribués à la foule? Gratuitement?! Oï, oï, oï! Mais qui m’a donné un fils pareil?» – «Certainement pas moi!», grommelerait alors Joseph, l’œil noir, caressant sa barbe dans un recoin sombre du salon.)
Oui, le Nouveau Testament ayant été soigneusement expurgé des tranches de vie les plus, hum, truculentes, on comprend mieux que l’humanité (et en particulier, la très catholique Pologne) ait été dupée pendant si longtemps. Au passage, on peut regretter que les saintes Écritures aient été si lourdement censurées, car quelques instantanés hauts en couleur de la vie quotidienne à Nazareth en auraient rendu la lecture autrement plus divertissante, je trouve. Il doit bien être possible de mettre la main sur le Director’s cut quelque part... Mais je m’égare. Revenons à notre scoop du millénaire.
Sérieusement, il semblerait que cette couverture sensationnelle illustre un dossier spécial consacré à l’«antysemityzmu» en «Polska». Hélas, je serai bien incapable vous en dire plus, à cause de mes grosses lacunes dans la langue de Karol Wojtyla. Après avoir passé le gros titre à la moulinette de Google Traduction, voilà le résultat: «Jésus LES JUIFS Maria! Comme la Pologne contemporaine face à la honte de l’antisémitisme?» Cet aimable charabia dépourvu de verbe ne donne pas follement envie de lire plus avant le reste de ce dossier éminemment prometteur. J’espère que vous ne m’en tiendrez pas rigueur.
Il ne me reste plus qu’à faire des conjectures, en guise de conclusion. Dans quelques siècles, dès lors que le bon peuple sera mûr pour supporter la cruelle et insoutenable vérité, Newsweek Polska titrera, selon toute vraisemblance:
«Michael LES NOIRS Jackson! Comme la Pologne contemporaine face à la honte du rasizmu?»
«Lady LES HOMOSEXUELS Gaga! Comme la Pologne contemporaine face à la honte du l’homofobią?»
«Zinedine LES MUSULMANS Zidane! Comme la Pologne contemporaine face à la honte de l’islamofobią?»
Qui ne saute pas n'est pas musulman! (photo trouvée ici) |
L’avenir nous le dira. Ce ne serait pas mal du tout qu’ils le fassent: une si belle couv’ donnerait envie de s’abonner illico à Newsweek Polska.
Sur ces considérations pleines de légèreté, je vous dis à très bientôt !
Je cite : «Michael LES NOIRS Jackson! Comme la Pologne contemporaine face à la honte du rasizmu?»
RépondreSupprimer«Lady LES HOMOSEXUELS Gaga! Comme la Pologne contemporaine face à la honte du l’homofobią?»
«Zinedine LES MUSULMANS Zidane! Comme la Pologne contemporaine face à la honte de l’islamofobią?»
Je suis pété de rire depuis tout à l'heure grâce à ces phrases, et à cause d'elles car ça me donne des crampes au ventre !!!
Hello! Vraiment désolé pour les crampes au ventre! J'espère que ça va mieux maintenant :-)
SupprimerBon weekend!
Il est vrai que la Pologne a pas mal de chemin à faire en ce qui concerne ce genre de choses (antisémitisme, homophobie, xénophobie, sexisme). L'église catholique tiens une grande part de responsabilités à cet égard. Ne pas oublier, avant le concile vatican II, le fameux "Oremus et pro perfidis Judaeis" qui a marqué forgé le catholicisme durant toute son existence. Il suffit d'assister à une messe dans un petit village en Pologne pour voir que le rite est dans une lignée Pie XI qu'apprécieraient à sa juste valeur les rejetons de civitas. J'ai pu entendre à plusieurs reprises en Pologne des propos antisémites de personnes pourtant soit disant éduquées. J'ai aussi assisté aux jets de bouteilles sur des participants de la gay pride à Cracovie de personnes sortant par le porche de l'église à laquelle ils venaient de célébrer l'eucharistie! C'est tout le paradoxe de la Pologne, Pays que j'adore énormément, mais qui me révolte tant sur ces points là. Il y a cependant beaucoup d'évolutions très positives. L'Eglise perd à très grande vitesse son emprise sur la société et les mentalités évoluent au même rythme. La nouvelle génération est beaucoup plus séculaire, très critique vis à vis de l'église au grand dam des curés (Karol se retourne dans sa tombe). Deux trois générations (peut-être moins, voir l'Espagne à ce sujet) et la situation sera semblable à celle de la France ou bien l'Allemagne. N'étant pas encore à ce niveau, cette couverture témoigne à mon avis d'un travail d'éclairage nécessaire à cette transition, même si à nos yeux cela parait abasourdissant.
RépondreSupprimerAh la fameuse prière pour les "juifs perfides", je pensais qu'elle avait disparu du paysage celle-là! Je suis allé à Gdańsk au printemps dernier et suis même allé à la messe de Pâques à la cathédrale (après avoir bataillé avec un site tout en polonais pour checker les horaires de la "msza święta", ultra-motivé!!), et les choses se passaient entièrement en langue vernaculaire, ce qui ne m'a vraiment pas aidé du tout! À la limite, c'eût été préférable que la messe soit dite en latin, j'aurais pu suivre bien plus facilement. Du coup, peut-être qu'il faut vraiment aller dans les petits bleds pour bénéficier des rites moins au goût du jour, car à Gdańsk, au moins ils ont arrêté le latin. Je pourrai pas te dire s'ils ont prié pour les juifs perfides cependant...
SupprimerJ'ai trouvé les Polonais gentils, du genre plutôt "entspannt" et accueillants. Sauf sur les routes, mais là c'est autre chose. J'aurais bien aimé y retourner pour la coupe de foot. Les choses finiront bien par changer, les gens s'enrichissent (à tous les points de vue) et s'ouvrent au monde, alors ça mettra le temps qu'il faudra, mais ça viendra!
Ah c'est bien vrai Sdrapeau!! J'ai été choquée de voir en Pologne dans un quartier genre HLM où les gens vivaient à 3-4 dans un deux pièces, la maison du prètre trôner au milieu avec la BMW flambant neuve le petit jardin et la grille.... O_o ... Sans parler des propos antisémites qui de toute façons rien que d'y penser me hérissent le poil à l'avance... Mais heureusment qu'il y a notre génération qui petit à petit s'échappe de l'église même si il a encore du boulot... To be continued!!!
RépondreSupprimerC'en est encore à ce point-là??? Bon c'est sûr que, comme dans tout pays, les mutations sociales et économiques ne vont pas partout à la même vitesse, et avec elles, l'évolution des mentalités! Mais, parole de noir, j'ai trouvé les gens gentils à Gdańsk! :-)
SupprimerJuifs certes, mais ashkenazes vu la représentation blonds aux yeux bleus. Si en plus ils avaient dû être sémites...
RépondreSupprimerDes juifs aryens en quelque sorte! On aura tout vu! :-)
SupprimerTu as déjà vu les représentations de Jésus et de Marie à la peau noire dans les églises haïtiennes? Eh oui, chacun voit midi à sa porte, et s'imagine un Jésus qui lui ressemble!