Je vais plutôt parler des préparatifs pour mon prochain voyage, en Syrie et au Liban dans quelques semaines, car c'est l'heure de s'occuper des formalités de départ.
Pour le Liban, le visa semble être une affaire assez simple, pour l'instant en tout cas. Aussi bien l'ambassade du Liban à Paris que celle à Berlin indiquent que les citoyens des pays de la "CEE" peuvent obtenir un visa à l'aéroport ou à la frontière. La "CEE"... ils sont calés en matière de relations internationales, ces fonctionnaires des ambassades libanaises. Mais passons. Espérons qu'il n'y aura pas de mauvaises surprises à l'aéroport.
Là où les choses se gâtent, c'est qu'après m'être longuement abreuvé d'informations séduisantes sur la culture du Liban et tout ce qu'il y a à voir dans le pays, je découvre enfin, et un peu tard, les avertissements du site du Ministère des Affaires Étrangères, qui sont assez peu encourageants, pour ne pas dire flippants. Oups, j'ai déjà mon billet d'avion et il n'a pas coûté grand chose. Peut-être n'était-ce pas un pur hasard que les vols soient à prix maxi-discount ? Morceaux choisis :
Image et carte du pays Liban
Les régions où les voyages sont formellement déconseillés sont indiquées en rouge. Les zones en orange sont à éviter sauf raisons professionnelles impératives |
"Les déplacements sont déconseillés (...) dans la Bekaa Nord, à l’exception du site historique de Baalbeck. Pour se rendre à Baalbeck, il convient d’emprunter la route principale, les axes secondaires étant formellement déconseillés. Dans la Bekaa Nord, des accrochages armés entre groupes rivaux peuvent affecter la sécurité des déplacements."
Voilà qui tombe bien : j'avais justement inclus comme priorités dans mon programme Tyr (en plein dans la grande zone rouge), Baalbek et leurs sites classés au patrimoine mondial de l'UNESCO. Il va falloir y réfléchir à deux fois. Quant à Tripoli, partie facultative de mon programme, on va sûrement laisser tomber. Pourquoi aucun des sites de voyages que j'ai lus avidement sur internet ne mentionne ces petites difficultés ? La palme revient au site wikitravel.org, qui recommande même d'acheter un t-shirt du Hezbollah à Baalbek : "they are an interesting souvenir" nous dit-on sur un ton badin. Le principal risque encouru dans la région selon eux ? De se faire avoir sur le prix et que le t-shirt déteigne au lavage. L'horreur absolue. Loin de ces considérations frivoles, ce rabat-joie de Ministère poursuit sa litanie de nouvelles nettement moins réjouissantes :
"Dernière mise à jour : 25 août 2010. Des affrontements armés se sont déroulés dans plusieurs quartiers de Beyrouth Ouest dans la soirée du 24 août, faisant plusieurs morts et des blessés."
"Les graves incidents sécuritaires survenus ces dernières années (notamment attentats et manifestations violentes) ont montré que la situation sécuritaire pouvait se détériorer rapidement".
"Dans le Sud du pays, la présence de très nombreux engins explosifs (mines ou sous-munitions) constitue un grave danger. Des accidents dont sont victimes des civils sont régulièrement déplorés."
"Des étrangers qui utilisaient des taxis collectifs ont été victimes de vols à main armée dans certains quartiers de la capitale. Il est recommandé d’éviter de recourir aux "taxis services" collectifs et, notamment à l’aéroport international de Beyrouth, aux personnes qui proposent leurs services avec un véhicule privé". Je peux me rassurer : l'arrivée de mon vol à Beyrouth est prévue à 3 heures du matin, une heure où les bandits armés dorment tranquillement chez eux, bien entendu.
Pauvre Liban. Je ne connais que des Libanais géniaux et ces mises en garde semblent tout simplement surréalistes. Pourquoi les gens font ça à leur propre pays ? Les puissances occidentales sont nettement plus pragmatiques : quand l'envie les prend de guerroyer, de bombarder et de massacrer, elles s'en prennent plutôt à des pays situés à des milliers de kilomètres. C'est beaucoup moins incommodant ainsi. Après tout, cela nous échappe le plus souvent, mais la France est actuellement en guerre, alors que le Liban est officiellement en paix... Prions pour qu'il le reste, même si le président iranien vient en ce moment même y ajouter son grain de sel.
J'ai été victime de la croyance naïve selon laquelle un pays qui ne fait pas les titres de l'actualité en permanence est un pays où tout va relativement bien. Et dire que, quand mon chef a ouvert de grands yeux et m'a dit que j'étais imprudent d'y aller, j'ai ricané intérieurement et l'ai pris pour un gros ringard, du genre de ces Allemands sans imagination qui passent leurs vacances dans un trois étoiles avec vue sur les plages bétonnées de Mallorca ou de "Teneriffa". À la lecture de tout ceci, il n'avait pas entièrement tort. Reste à espérer que tout se passera bien sur place et que les Libanais sauront se retenir de se taper dessus pendant encore un certain temps.
En revanche, malgré quelques détails alarmistes, le Ministère des Affaires Étrangères semble heureusement considérer la Syrie comme un pays relativement sûr. Aucune mention n'est faite du contexte politique intérieur et du comportement à adopter. Faire profil bas devrait suffire.
"Les principaux lieux fréquentés par les touristes sont en revanche accessibles dans des conditions normales. Il convient d’adopter toutefois une attitude prudente, des cas de pickpockets ayant été récemment signalés." Ouh là là, des pickpockets ? Quel scandale ! Tout est remis en question.
"Compte tenu des incidents multiples rapportés par les autorités officielles de Damas, il est également recommandé de ne pas s’aventurer dans la zone frontière entre le Liban et la Syrie." Il va bien falloir que je la traverse, cette frontière, et apparemment cela se fait tous les jours sans problème. J'espère que par "s'aventurer" ils parlent de partir en randonnée ou à la cueillette aux champignons avec des copains du Hezbollah.
"D’une manière générale et compte tenu de certains incidents survenus depuis 2004 (fusillade, tentative d’attentat à la voiture piégée à Damas, incidents dans certaines zones rurales à l’été 2005, tentative d’attaque de l’ambassade des États-Unis en 2006, attentat dans la capitale le 27 septembre 2008), il est recommandé aux voyageurs de se tenir régulièrement informés et, à cette fin, de consulter ce site." Imaginons un peu la situation inverse : en cherchant bien, quelles mises en gardes les autorités syriennes peuvent-elles adresser à leurs ressortissants qui seraient assez imprudents pour se rendre en France ? À supposer, bien sûr, que le site du Ministère syrien des Affaires étrangères soit plus à jour que ceux des ambassades : "D'une manière générale et compte tenu de certains incidents survenus depuis 2003 (meurtre d'une actrice célèbre, émeutes urbaines périodiques dans les banlieues, voitures incendiées par centaines le 31 décembre de chaque année, multiples découvertes de bébés congelés, élection de Nicolas Sarkozy et annonce par les autorités de plusieurs attentats en cours de préparation), il est recommandé aux voyageurs de se tenir informés, d'éviter les banlieues, les centre-ville les soirs de fête, les maternités, le métro, la tour Eiffel, les bureaux de vote, TF1 et les concerts de Noir Désir." Bref, c'est louable d'informer le public, mais ils jouent un peu à nous faire peur. Et puis c'est sympa de leur par de recommander aux voyageurs de "consulter ce site"... précisément sur le site en question.
Bref, tout cela promet des vacances riches en émotions.
Ah, le mot de la fin : si l'on en croit le Ministère, ce n'est pas dans cette région que ma carrière de trafiquant de drogue va décoller. Trois fois hélas !
"En Syrie, les crimes et délits liés aux stupéfiants sont très sévèrement réprimés. Les personnes accusées de contrebande, fabrication ou culture de stupéfiants encourent la peine de mort, la réclusion à perpétuité ou, une peine d’emprisonnement d’au moins 20 ans. Les personnes accusées de trafic de stupéfiants risquent la réclusion à perpétuité et une amende de 25.000 à 100.000 euros."
"Avertissement concernant la drogue [au Liban] : La législation est très sévère et strictement appliquée. La simple possession ou consommation de drogue, même en quantité limitée à quelques grammes, est punie comme le trafic lui-même. Les peines d’emprisonnement applicables vont de 3 mois à perpétuité et sont assorties d’une amende importante (...) . Les conditions de détention au Liban, même pour une courte période, sont éprouvantes en raison de la surpopulation et de la vétusté des locaux pénitentiaires. (...) Les interventions sur dénonciation, y compris chez les particuliers, ne sont pas rares."
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Un petit bonjour ?