samedi 8 janvier 2011

On a testé : Les Méchantes libidineuses du Klub der Republik

Le Klub der Republik, ou tout simplement "KdR", sur Pappelallee ("allée des Peupliers", comme c'est mignon), c'est ce bar-boîte mythique du quartier le plus bobo de la ville, l'un de ces ultimes vestiges d'une époque révolue où Prenzlauer Berg était un quartier intéressant pour sortir à Berlin le soir, et pas encore une silencieuse colonie de familles CSP+ ouest-allemandes, où chaque mois une crèche ouvre et un bar ferme, chassé par la hausse des loyers et l'hostilité grandissante des nouveaux habitants qui ont bien vite oublié que l'une des raisons pour lesquelles ils ont choisi de s'installer dans ce quartier, c'est précisément parce qu'il était  branché, animé et peuplé d'individus créatifs qui sortent dans des bars qui font du bruit après 21h le samedi soir. 

Comme dans tout bar berlinois qui se respecte, la sélection musicale y est dominée par l'électro, les lumières sont tamisées, le mobilier, vieillot et dépareillé, les fenêtres poisseuses, l'air enfumé, la visibilité réduite et la bière, fraîche et abondante. Une fois que l'on y est entré et que l'on a habitué ses poumons à une atmosphère enrichie en substances et particules hautement cancérigènes, on se laisse gagner par l'ambiance relax et la bonne musique. Par ailleurs, un dernier élément important du cahier des charges des bars berlinois auxquels le KdR ne déroge pas, c'est d'organiser de temps à autre des soirées gay-friendly. Ainsi, c'est au Klub der Republik qu'ont lieu certaines des soirées lesbiennes les plus appréciées de ces dames. En fait, je ne sais rien de l'appréciation de ces dames et de la réputation du KdR dans le milieu, c'est juste le seul endroit à Berlin où je suis allé en soirée "Ladies' Night" selon le doux euphémisme employé par le videur, visiblement soucieux de m'éviter de mauvaises surprises et un trop grand nombre de râteaux. Merci mon gars, t'es un frère pour moi.

Ainsi, avec quelques collègues nous avons dignement fêté le 61ème anniversaire de la création d'une autre République, la RDA (le 7 octobre 1949) à l'automne dernier à la soirée "Girl's Republic". En bon anglais j'aurais plutôt écrit "Girls' Republic", si on me permet de ramener ma science, mais je ne vais pas leur tenir rigueur pour cette petite coquille. Rien à dire de particulier, une soirée normale et bien sympa, féminine à 90%, tous âges et tous types confondus. Bien évidemment les mecs célibataires parmi nous sont rentrés bredouilles ce soir-là. Le 7 octobre 2010 était un jeudi, et le vendredi au bureau fut difficile pour beaucoup d'entre nous. Mais l'expérience était largement positive et c'est pourquoi nous y sommes retournés hier soir, déjà bien égayés par un excellent début de soirée et notre fameux dîner français au foie gras, car ce vendredi il y avait encore une soirée Girl's Republic au KdR. Et là, c'est le drame.

"Vous êtes combien ?
– Six.
– Ça ne va pas, il y a trop d'hommes. C'est Ladies' Night ce soir.
– Mais on est gentil et on est là pour s'amuser, tout simplement.
– Et vos deux amies, là, elles sont lesbiennes ?
– Bah oui, et comment qu'elles sont lesbiennes ! La vérité, plus lesbienne, tu meurs !!
– Allez les filles, soyez pas timides, chopez-vous pour prouver au monsieur que vous l'êtes.
Ohne Scheiss ("Sans déconner")? Je ne vous crois pas. C'est une soirée pour que les femmes puissent se rencontrer et s'amuser entre elles. Là c'est trop. Désolé."


Le KdR depuis Papelallee, un soir calme sans doute
Le videur, gay comme un pinson, nous a donc mis un "Je crois que ça va pas être possible" dans les dents. Très gentil, visiblement navré pour nous, mais ferme et définitif. Tant pis, il était déjà bien tard et nous sommes donc rentrés nous coucher, défaits. Chères Ladies du KdR, n'avez vous pas l'impression qu'il s'agissait de discrimination ? Je n'aime pas beaucoup ce mot mais il faut appeler un chat un chat... Que diriez-vous si l'on vous refusait l'entrée d'un bar ouvert à tous en invoquant votre sexualité ? Là ça ferait désordre et vous auriez raison de ne pas apprécier ce genre de traitement. Or, vu le tour de vis réac et intolérant qui risque de se produire ces prochaines années dans un bon nombre de pays européens, une telle situation n'est plus à exclure.

Le Klub der Republik : on a testé et on a aimé (nos poumons, un peu moins).
La soirée "Girl's Republic" : on aurait sûrement aimé si on avait pu la tester une deuxième fois.

4 commentaires:

  1. lol
    c'est pas être réac ou intolérant, d'autant que t'as pu déjà y entrer...
    La boîte annonce la couleur, elle est communautariste, ouverte mais de temps en temps, il y a un retour à l'autarcie, rien de plus normal...
    il me semble que ces pratiques sont monnaies courantes dans les boîtes vipement hétéros capitaslistiques non?
    et là, force est de constater que la discrimination repose sur un cumul de choses qui dépasse le simple caractère sexuel, qui a l'avantage d'être facilement identifiable!
    et puis la saphisme est un contre-poids au mal berlinois qui rampe...dans lequel j'inclus les petits cadres qui bossent dans la finance,trop sympas avec tout le monde, qui font la fête ensemble et entre eux et qui se la joue keep cool attitude..ni bobo, ni vraiement beauf...
    enfin merci pour cette pause...j'ai tes 2 articles du jour avec bcp de plaisir
    ça fait du bien quand c'est pas trop la papate
    je t'envoie un mail privé bientôt
    bisous

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  2. Attends, mon article n'a peut-être pas été clair, c'est une boîte absolument pas communautariste mais qui organise de temps en temps ces soirées lesbiennes, où là subitement n'entre pas qui veut... un peu dommage mais bon. À Berlin c'est très rare de se faire refouler à l'entrée d'une boîte. C'est pas comme à Paris où c'est la norme. Oui la "keep cool" attitude, c'est normal à Berlin :-)
    Allez bon courage et à bientôt.
    Bise.

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  3. Un très chouette premier paragraphe qui résume bien, tout comme le billet précedent, le drame de la ville...

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  4. Hum...je suis partagée...je comprends ton point de vue mais je comprends le leur aussi et je vais me faire un peu l'avocate du diable :
    Visiblement c'est une soirée filles pour trouver des filles. Ca veut pas dire que le reste du temps elles détestent tous les hommes mais là a priori l'idée c'est de rencontrer des personnes pour une nuit ou pour la vie...
    Donc concrètement toi tu ne les intéresses pas! Et la place que tu prends dans le bar c'est une fille de moins! :)

    En plus je suppose que dans ce genre de soirées il y a toujours des gens qui rentrent pour "voir de la lesbienne" si je puis dire et d'autres qui l'alcool aidant vont quand même tenter leur chance car tu comprends siellesavaientcouchéavecmoiellesseraientpaslesbiennescestsûr... etc etc...

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Un petit bonjour ?

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