Chers gens, je suis bel et bien rentré à Berlin, il n’y a pas à s’y tromper. La semaine dernière, j’ai dignement fêté Silvester dans la capitale teutonne, ainsi que de coutume, après m’être inscrit sur les listes électorales consulaires au terme d’une expédition à l’ambassade de France digne d’un épisode de la série “24”, n’ayons pas peur des mots. J’ai même repris le boulot, c’est dire que la vie normale a repris son cours.
Cependant, je tenais à refermer convenablement – et, bien entendu, temporairement – le chapitre consacré à la Martinique dans ces pages. En vous montrant quelques photos supplémentaires de ma belle île par exemple. Puisque ce blog vous propose une rubrique «Beauté de Berlin», qu’est-ce qui m’empêche de vous faire un billet «Beauté de la Martinique» aussi, mmmh ? Voilà qui est dit. Alors allons-y sans plus tarder, et replongeons-nous une dernière fois dans la douceur antillaise.
À l’Anse Turin, la longue plage rectiligne qui borde la route entre les communes du Carbet et de Saint-Pierre, des traces de pas sur le sable volcanique vivent leur dernière seconde d’existence avant d’être impitoyablement dévorées par les eaux bleues de la mer des Caraïbes. On ne s’est jamais intéressé au destin tragique des traces de pas dans le sable, ni à leur cruelle fin. Pourtant, elles ne demandent qu’à être écoutées, les pauvres, et je suis sûr qu’elles auraient des choses passionnantes à nous raconter. Quelle injustice.
Chronique d'une mort annoncée à la plage du Carbet |
Après avoir dépassé le Carbet, si vous continuez à longer la côte Nord-Caraïbe de la Martinique, vous atteignez Saint-Pierre, la ville détruite par le volcan en 1902, puis la petite bourgade du Prêcheur. Après le Prêcheur, impossible d’aller plus loin. Passé les deux dernières plages volcaniques de l’Anse Céron et de l’Anse Couleuvre, réputées pour leur eau aussi cristalline que fourbe, pour leurs courants traîtres et leurs gros rouleaux prisés des surfeurs, la route côtière finit en cul-de-sac face à un mur de végétation. Si vous voulez vous entêter à faire le tour de l’île, il vous reste la marche à pied : la randonnée Prêcheur-Grand’Rivière vous permet de parcourir ce chaînon manquant de la route littorale à travers l’un des secteurs les plus sauvages et inhospitaliers de la Martinique.
L'Anse à Voile, entre Prêcheur et Grand'Rivière, accessible uniquement par la mer |
Armez-vous de votre courage et de bonnes réserves d’eau, et durant cinq heures de marche à travers l’épaisse forêt tropicale, à flanc de volcan, vous enjamberez des racines monumentales de fromagers, franchirez quelques providentielles rivières bien rafraîchissantes, vous enfoncerez dans la végétation ou vous élèverez sur des hauteurs vous donnant un spectaculaire panorama sur les eaux houleuses du Canal de la Dominique, et sur l’île voisine du même nom. Au bout de votre périple, vous rejoignez enfin la «civilisation», une notion toute relative car en fait vous atteignez Grand’Rivière, petit village de pêcheurs qui se trouve être la commune la moins peuplée de Martinique (autour de 900 habitants), la plus inaccessible aussi, et représente une sorte de «bout du monde» à l’échelle de l’île. Pensez-vous, la distance qui la sépare de Fort-de-France, par la route, va chercher dans les 60-65 kilomètres ! Le bout du monde, vous dis-je.
La petite église de Grand'Rivière décorée pour les fêtes de fin d'année |
Vous êtes rendu à Grand’Rivière et vous êtes offert des écrevisses grillées ou des acras de «titiris» (petits alevins) pour vous récompenser de vos efforts. C’est bien joli tout cela, mais après, que faites-vous ? Comment regagner la civilisation, la vraie, sans vous taper à nouveau cinq heures de marche dans la forêt ? Il y a deux écoles. Vous pouvez héler une barque de pêcheur et retourner par la mer au Prêcheur, vous octroyant ainsi une croisière décoiffante à bord d’un canot motorisé qui bondira joyeusement pendant une bonne vingtaine de minutes sur les vagues bleu sombre et vous ramènera à bon port. Il n’est pas garanti que vous garderez vos écrevisses grillées dans l’estomac. Mais si vous avez tant soit peu le pied marin, la promenade est plutôt agréable et vivifiante, et vous permet d’admirer la côte remarquablement sauvage et préservée du Cap Saint-Martin et de l’Anse à Voile, celle-là même où vous avez crapahuté et sué toute votre eau des heures durant à flanc de montagne.
Sinon, vous pouvez poursuivre votre circuit par la route, laissant derrière vous Grand’Rivière et le Canal de la Dominique pour longer la côte Nord Atlantique de la Martinique. L’unique route qui relie Grand’Rivière au reste du monde passe elle aussi à travers des massifs forestiers, mais ceux-ci sont incomparablement plus impénétrables que ceux que vous avez parcourus à pied. L’isolement géographique de Grand’Rivière saute alors aux yeux. La commune la plus proche, Macouba, n’est qu’à une neuvaine de kilomètres, mais la route qui vous y amène est si étroite et sinueuse, et les contreforts de végétation qui la bordent sont si denses, que la distance importe peu. C’est un vrai voyage.
La route entre Grand'Rivière et Macouba, au nord de la Martinique : fougères arborescentes, bambous, et toute une végétation luxuriante et impénétrable qui sert d'abri à deux ou trois bestioles. |
C'est comme le drapeau du Québec, les fleurs de lys en moins. |
La commune du Vauclin est située sur la côte Atlantique de la Martinique, et est très exposée aux alizés. Par conséquent, ses plages sont particulièrement venteuses. Mais là-bas, lorsque le vent souffle particulièrement fort, on ne dit pas «il vente à décorner les bœufs» mais «il vente à déshabiller les cocotiers». Non, chers amis lecteurs, je vous fais marcher. Mais vu ce que la bourrasque fait subir aux cocotiers qui depuis des décennies montent vaillamment la garde face à la mer sur la plage de la Pointe Faula, haut lieu de la planche à voile, on se dit que cette expression ne demande qu’à être inventée.
The Wind that Shook the Cocotiers |
Situé sur la côte atlantique de l’île, le Vauclin n’est pas un point d’observation idéal pour admirer des couchers de soleil à tomber à la renverse, puisque le rivage fait face à l’est. Il n’empêche que si l’on se tient, à l’heure du crépuscule, sur la plage du Grand Macabou, et que l’on se retourne vers la terre, on peut voir ceci :
Crépuscule au Grand Macabou |
Et je trouve que c’est un bon lot de consolation pour les inconditionnels des couchers de soleil sur la mer Caraïbe, tout de même. Il faut savoir varier les plaisirs.
Pour finir avec cet adieu à la Martinique, je vais maintenant vous présenter sa fameuse Dame Couchée. C’est plus qu’une femme, c’est une géante : personne ne sait combien elle mesure, mais si elle venait à se mettre debout, elle mesurerait bien dans les 5 kilomètres de haut, peut-être plus. Toute couchée qu’elle est, elle pointe son nez et son menton vers le ciel, et ce dernier culmine, tout en haut du Morne Larcher, à 477 mètres d’altitude. La Dame Couchée, c’est le surnom donné aux reliefs montagneux qui surplombent la commune du Diamant, tels qu’on les voit au loin, depuis le littoral sud de la Martinique, à Sainte-Anne, au Marin ou à Sainte-Luce. On distingue clairement sa chevelure qui s’étale vers le «sol» sur lequel elle est étendue, l’orbite de ses yeux, son nez, son menton (le plus haut sommet), son cou, sa poitrine, ses petits seins, et son ventre.
La "Dame Couchée" aperçue depuis la plage de la Pointe Borgnesse, au Marin |
Certes, elle est tout le contraire d’un canon, notre Dame Couchée, avec sa grosse tête difforme, son menton proéminent, sa poitrine chétive, risée de toutes les géantes du coin (et aucune prothèse PIP à sa taille en plus, un comble !!), qui termine sa course sur un ventre flasque et ondulé de bourrelets, mais c’est l’un des panoramas les plus caractéristiques de la Martinique, l’un des rares qui soient instantanément reconnaissables, avec, seul dans la mer, le Rocher du Diamant.
Et puis, c’est tant mieux qu’elle n’ait pas des mensurations de rêve, la Dame Couchée, sinon elle donnerait des complexes aux baigneuses qui, du coup, face à cette bien piètre concurrence, n’ont aucun scrupule à prendre la même pose et à créer, peut-être involontairement, de savoureuses mises en abyme...
Sainte-Anne : Dame Couchée et... euh... dame couchée. Ça fait du bien de se prendre pour un ado parfois, gnark, gnark, gnark. |
Voilà, sur une photo de plage et de dames couchées, je clos ce chapitre martiniquais et vous ramène à nouveau vers les rivages un peu moins lumineux de la Spree !
Bon dimanche soir et à très bientôt.
Tu donnes vraiment envie d'aller visiter la Martinique!
RépondreSupprimerLa mer n'efface sur le sable que le pas des amants désunis.
RépondreSupprimerDeux choses:
RépondreSupprimer-un, tu continues à nous parler de ton île jusqu'à ce que l'hiver berlinois commence pour de vrai, au moins ça réchauffe.
-deux, tu es prêt à tout pour ramener des lecteurs, dernière photo aguichante ;-) que je n'avais pas vu ce matin sur mon téléphone.
@ E.- Ce n'est pas exactement le but recherché mais je suis content que cela produise un tel effet :-) Si tu me demandes quel était le but recherché, je ne saurai pas quoi trop répondre à part que j'ai eu envie de montrer et de parler de choses qui m'ont touché...
RépondreSupprimer@ Alain - une citation qui tombe à point nommé ! Merci de nous remettre cette belle phrase en tête. En l'occurrence c'était mes traces de pas à moi tout seul et elles ont été impitoyablement effacées :-)
Hé salut Jérémie !
RépondreSupprimerC'est vrai que ça réchauffe, ces pensées et ces photos au milieu de l'hiver ! Malheureusement il va bien falloir que je parle d'autre chose hein ;-)
Sinon, pour la photo, zut alors, comment tu m'as grillé !!!!! Ça se voit tant que ça ? Les ficelles sont si grosses ? D'ailleurs en parlant de ficelle... bref je m'égare. En fait sans rire j'ai mis cette photo non pas pour attirer le lecteur et lui mettre la bave aux lèvres, mais vraiment parce que j'aimais bien cette juxtaposition sur le thème de la Dame Couchée.
J'ai déjà mon compte de visiteurs qui atterrissent sur mon blog en cliquant "Gaetane Thiney + SEINS" ou "Corine Franco Nue" ou "Élodie Thomis Tatouage" et du coup mon post sur les footballeuses à poil ("À catin, catin et demi") est de très loin celui qui a reçu le plus de clics depuis le début du blog... mais le nombre de commentaires reste bloqué à zéro. J'ai deux trois autres billets comme ça où juste le fait de mettre une femme en petite tenue attire tout plein d'internautes en mal de sensations, bah en fait c'est pas génial parce que j'aime bien qu'on vienne voir mon blog pour son contenu, pas pour chiper des photos sexy et satisfaire ses fantasmes :-/
À plus, bonne soirée !
Elles sont superbes tes photos!! Idéale pour se relaxer :-D
RépondreSupprimer@ Little Cat - oui la Martinique a ce côté relaxant... on se demande d'où ça vient hein ?
RépondreSupprimer:-)
relaxant, relaxant... Je vois que tu ne parles pas des gens qui partent avant 6 h du matin pour aller travailler à FdeF (je parle des gens du sud, bien sûr) et éviter les embouteillages.
RépondreSupprimerC'est vrai que la route Le Carbet-Saint-Pierre est magnifique. Je ne m'en lasse pas.
@ Jackie Brown - chuuuuttt !! Ne casse pas le mythe ! Moi qui fais tout à vélo ou en train ici à Berlin je peux te dire que les embouteillages permanents de la Martinique, oui ça me bouffe les nerfs en fait. Le pire c'est d'aller à "La Galleria".
RépondreSupprimerMais quand j'y passe mes vacances, bah j'arrive au maximum à prévoir mes déplacements en-dehors des heures les plus difficiles ! Et là c'est plus relaxant :-)