lundi 22 août 2011

U-Bahnhof Schlesisches Tor

Chères Vahinés haletantes sous le soleil caniculaire, je sais que je vous ai quelque peu négligées ces derniers jours. La culpabilité me ronge et le remords m’obsède, au point d’en perdre l’appétit et la joie de vivre, et de voir chacune de mes nuits hantée de cauchemars angoissants et récurrents, où un groupe de Lectrices mécontentes se masse furieusement à ma porte. Armées de talons aiguilles, de rouleaux à pâtisserie, de pics à glace et de toutes sortes d’objets contondants, parfois juste avec leurs dents, elles attaquent alors la poignée et les gonds, leur portant des coups d’une rare sauvagerie; elles viennent facilement à bout de ces dispositifs, protections dérisoires face à leur détermination acharnée. La porte cède avec fracas, et mes assaillantes déchaînées déferlent dans mon appartement vandalisé comme une masse chevelue et stridente. Terrorisé, acculé, je n’ai guère que le temps de me cacher dans une armoire branlante avant d’être découvert, que des mains aux ongles écarlates ne se saisissent violemment de moi et me... euh... hum, hum. Bref, des cauchemars éminemment cauchemardesques qui, je l’espère, vous feront comprendre l’étendue de mon trouble et vous inspireront la clémence. 

Mais surtout, j’ai l’excuse absolue, celle qui, je le sais, suffira pour que vous me pardonniez tout, et même plus encore: c’est que le beau temps est arrivé à Berlin cette semaine! Qu’il est bon d’avoir chaud, de s’enduire de crème solaire avant d’aller faire du sport, de se mettre à nouveau en short, de traîner dans les parcs et de s’attarder aux terrasses des cafés, de déjeuner sur un balcon où l’on s’est remis à arroser les fleurs, d’aller nager au lac pour l’une des dernières fois sans doute, avant l’arrivée de l’automne... En un mot, nous disposons tout juste de quelques jours pour profiter de l’été, et nous comptons bien en tirer parti!

En fait on ne voit pas très bien sur la photo, mais ça dansait à fond
La nuit dernière, vers 2h du matin, j’étais déjà sagement sur le chemin du retour après un samedi bien rempli suivi d’une soirée en demi-teinte, histoire de pouvoir me réveiller tôt ce matin et utiliser à bon escient les heures de soleil qui étaient prévues pour dimanche qui s’annonçait estival. Et là, dans la station de métro Schlesisches Tor, un coin de Kreuzberg connu pour ses enfilades de bars et de kebabs, je tombe sur une de ces scènes que j’ai vraiment beaucoup de mal à imaginer à Paris ou ailleurs, du typiquement berlinois: à l’endroit où l’escalier d’accès aux quais se divise vers les deux directions opposées, un DJ a installé des platines rudimentaires et improvisé une discothèque de fortune. Un petit groupe de fêtards, constitué en grande partie de Nord-Américains qui n’ont probablement pas encore atteint l’âge légal pour picoler dans leur pays, se trémousse frénétiquement et surjoue la bonne humeur. Ah que c’est cool, la «Berlin nightlife» que leur a vanté leur guide touristique!

Ici, vous voyez peut-être que les gens dansent: il y a des bras en l'air!
Je me rappelle une époque, quand j’étais encore tout nouveau dans la capitale teutonne, où une telle scène m’aurait sans doute grandement impressionné et empli de satisfaction à l’idée de vivre dans la capitale la plus in d’Europe. Mais maintenant, après trois ans de Berlin au compteur, je suis capable d’assister à une telle scène avec détachement, et un mélange d’amusement indifférent et de vague désapprobation devant tant d’overcoolitude assénée bruyamment et de manière similaire de semaine en semaine. Wouaouh, des djeunz qui font la fête dans une station de métro qui pue le kebab et le vomi, das ist hammergeil! Allez, c’était tout de même une distraction intéressante et inhabituelle, et les douze minutes d’attente du métro n’en sont passées que plus vite. Je me suis engouffré dans mon train jaune pendant que des enceintes hurlaient «Smack My Bitch Up» quelques mètres plus bas, sans jeter un dernier regard vers ces singuliers noctambules, et en me demandant s’il était possible que ces DJs soient en fait employés par l’office du tourisme berlinois pour faire vivre le stéréotype. Ce serait drôlement cynique, et pourtant cela ne me paraît même pas impossible.

Liebnitzsee, commune de Wandlitz, dans le Brandebourg, dimanche après-midi. Le soleil nous a lâchés, une fois de plus, mais les adolescents s'amusent comme des fous malgré tout dans l'eau très fraîche.


Dimanche n’a certes pas été aussi ensoleillé que prévu, et la déception se lisait sur nombre de visages bien trop pâlichons pour la saison. Mais il n’y a pas à se plaindre, quand on sait d’où l’on vient! J’ai tout plein de trucs à raconter, comme d’habitude. J’espère m’en sortir et trouver le temps de finir les autres billets! À très bientôt donc, chères Lectrices. Il se fait tard, mais j’hésite à aller me coucher, de peur de refaire ce même cauchemar terrifiant...

Karl-Marx-Allee, jeudi 18 août vers 20h. Mon avenue préférée (ici, vue là où elle est laide) a retrouvé ses couleurs. 

La méga teuf trop cool dans le U-Bahn avec le son tout de même!

4 commentaires:

  1. Tu deviens blasé, chroniqueur, ou est ce l'age qui monte te rendant plus difficile à satisfaire ;)
    Pourquoi ne pas se laisser aller, danser profiter du moment présent? Tes centres d'intérêt changent, tu évolues...
    Dua

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  2. Hey! Merci pour ce gentil mot plein de réflexion, chère Dua "Life Trip" :-)
    En effet, nous changeons et évoluons tous, et l'effet nouveauté de Berlin s'est bien estompé, et ce genre de manifestations over-cool ne suffisent plus pour m'impressionner et m'emballer comme avant!
    Mais tu as bien raison, ce n'est pas une raison pour devenir un vieil aigri grincheux, t'inquiète! S'il n'était pas 2h du matin et si je n'avais rien de prévu le lendemain, j'aurais sûrement dansé un peu avec ces djeunz cool :-)
    Bonne semaine!

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  3. Bon je suis un peu en retard mais le froid ambiant m'empêche enfin de sortir et me permet de me remettre à la lecture des blogs berlinois. Tout ça pour te dire que je partage ton point de vue d'aigrie. Je ne sais pas non plus si c'est l'âge ou mes 2 ans et demi de Berlin mais moi non plus ce genre de spectacle ne m'émeut plus. Enfin Berlin reste quand même plus amusante que Paris !

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    1. Déjà trop froid pour sortir ??? Sacrebleu, on n'est qu'à la mi-novembre !!! Bon courage pour les 4 mois d'hibernation à venir alors :-)

      Je vis à Friedrichshain et voit des trucs de ce genre en permanence. J'ai rien contre (pas encore un vieux con tout de même hein!!) mais effectivement, je suis content d'apprécier Berlin pour d'autres choses que ces beuveries débiles d'adolescents anglo-saxons dans les lieux publics...

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